Pour un grand nombre de passionnés d’automobile, les Jaguar des années 70/80 sont synonymes de manque de fiabilité et de lourde consommation. L’achat et l’entretien d’un de ces modèles est souvent vu comme du « masochisme ». Qu’en est-il réellement ? Rien de mieux que de partir en virée pour se faire un avis. Et puisque la consommation de notre plantureuse anglaise à moteur V12 est annoncée comme gargantuesque, pourquoi ne pas se rendre en Champagne pour assurer en même temps la consommation des pilotes ?
C’est ainsi qu’une partie de l’équipe Retromotiv s’est rendue dans la région de Reims, un vendredi pluvieux du mois de mai, pour un week-end au volant de leur XJ-S HE de 1987. Mais avant d’insérer la clé de contact, revenons sur l’histoire tourmentée de la série des XJ et de son V12 emblématique afin de tenter de comprendre d’où vient cette mauvaise réputation qui leur colle à la carrosserie.
L’histoire de Jaguar est intimement liée à son fondateur : William « Bill » Lyons. Dans les années 20, il fit évoluer sa petite fabrique de side-cars en une entreprise construisant des automobiles sur base d’Austin 7. Dès les années 30, il entreprit de produire ses propres voitures en utilisant des moteurs empruntés à la Standard Motor Company. A cette période, il fut rejoint par des ingénieurs talentueux : Walter Hassan et William Heynes. Pendant la seconde guerre mondiale, le trio recruta un 4ème homme : Claude Baily. Durant les nuits de bombardements, les quatre hommes tuaient le temps en dessinant les plans d’un moteur maison, le mythique XK à double arbre à cames en tête, en prévision de jours meilleurs.

Au lendemain de la guerre, le moteur XK permit à la bande de Bill Lyons de connaître une ascension fulgurante. Bien que les berlines de la marque de Coventry doivent toute leur élégance au patron, les modèles de sport et de compétition ont été dessinés par Malcolm Sayer, génial aérodynamicien issu de l’aéronautique et embauché en 1951. C’est ainsi que les type C et les type D, équipées du 6 cylindres XK, ont remporté les courses les plus prestigieuses, dès le début des années 50. Les modèles de série recevaient ce même moteur, ce qui engendra le succès des berlines de Coventry. Autre clé de la réussite, William Lyons a toujours exigé de ses collaborateurs une gestion drastique des coûts de production. Il pouvait, de ce fait, proposer des voitures d’exception à des prix très compétitifs.



Dès 1954, Hassan, Heynes et Baily travaillèrent sur l’ébauche d’un V12 de 5 litres qui devait reprendre les culasses double arbre à cames du moteur XK pour la compétition. Un projet sans aboutissement car la firme Jaguar Ltd se désengagea des grandes courses automobiles à partir de 1957. Quelques années plus tard, au milieu des années 60, les trois ingénieurs, aidés d’Harry Mundy, ressortirent les plans du V12 pour un éventuel retour aux 24 heures du Mans. Six moteurs V12 à 4 arbres à cames en tête furent construits. L’un d’eux fut installé à bord de l’unique XJ13.


Bien que rapide, les essais de cette bête de course ne permirent pas d’atteindre les performances de la Ford GT40 et son V8 de 7 litres. En 1967, le projet XJ13, considéré trop coûteux, fut abandonné. C’est à ce moment que Jaguar rejoignit la nébuleuse British Motor Corporation (BMC). Cette dernière devint ensuite la British Motor Holding (BMH) avec l’entrée dans le groupe de la société d’emboutissage Pressed Steel, puis British Leyland Motor Corporation (BLMC) avec l’ajout du fabricant de camions British Leyland. L’industrie automobile britannique traversait une véritable crise. Les syndicats, omnipotents, faisaient la pluie et le beau temps sur les chaînes de production. La qualité de fabrication des modèles Jaguar commença à décliner, à l’instar de l’ensemble de la production automobile anglaise.
A la fin des années 60, le V12 et ses doubles arbres à cames, trop bruyants et mal adaptés à une utilisation hors compétition, furent, une nouvelle fois, remaniés afin d’être utilisés dans un projet de berline luxueuse. On remplaça les culasses par des modèles à simple arbre à cames et la cylindrée fut portée à 5,3 litres. Ainsi, le fougueux moteur de la XJ13 devint plus silencieux et sa zone rouge abaissée de 8000 à 6500rpm. La courbe de couple fut retravaillée pour permettre de meilleures performances à bas et mi-régime. En définitive, ce V12 5,3 litres de 272ch prit place sous le capot de la type E série 3, en 1971.


William Lyons, sur le point de tirer sa révérence, se lança dans l’ultime projet de sa carrière. Désireux de simplifier la large gamme des berlines, composée alors des Mk2, 240, 420, type S et 420G, il dessina la berline XJ qui, en 1968, remplaça tous les anciens modèles vieillissants. Cette dernière reçut le V12 en 1972, lui donnant l’appellation XJ12 et faisant d’elle la berline la plus rapide de son époque. Cette superbe voiture, ultime fierté du vieux Bill Lyons, souffrait des conflits sociaux que connaissait la Grande Bretagne à cette époque. Le cœur n’était plus à l’ouvrage sur les chaînes de l’usine Jaguar de Browns Lane et cela se reflétait dans la piètre qualité de fabrication de l’auto. Tout cela contribua à ternir durablement l’image de Jaguar.







C’est dans cette atmosphère délétère qu’est née la XJ-S. Voici, brièvement, la genèse de ce modèle à l’histoire tourmentée :
A la fin des années 60, sentant que la type E commençait à passer doucement de mode, il fallait aller de l’avant. Bill Lyons, dont le pouvoir décisionnel commençait à décliner depuis que sa firme avait été engloutie par le groupe BLMC, chargea son designer, Malcolm Sayer, de concevoir un tout nouveau coupé. Après quelques tergiversations autour d’un prototype nommé XJ21 reprenant les proportions de la type E, le nouveau projet fut baptisé «XJ27». L’idée était de plaire au marché américain en quête de GT puissantes. Les premières ébauches reprenaient les proportions du projet XJ21, tout en modernisant ses lignes en accord avec le style de la berline XJ.




Fort de son passé dans l’aéronautique et assisté d’une équipe de jeunes designers, Sayer travailla sur des lignes tendues, cherchant à réduire la traînée de la voiture et à améliorer son coefficient de pénétration dans l’air. Le dessin, novateur, tranchait avec le style traditionnel de la marque. Signe distinctif dicté par ses considérations aérodynamiques, les flying butresses, entourant la malle arrière, avaient pour but de dompter les turbulences qui agitent le flux d’air sur toute voiture à cet endroit. Agissant comme des dérives, elles stabilisaient l’auto à vive allure, à l’instar de l’aileron de la type D. L’intérieur de la voiture, proche de celui de la XJ série 2, était constitué de plastique et d’aluminium brossé, très à la mode dans ces années là. Mais Lyons, préparant sa retraite, se désintéressait de plus en plus de l’avenir de Jaguar et Sayer mourut d’une crise cardiaque en 1970. Une équipe de designers de BLMC, à la tête de laquelle se trouvait un certain Doug Thorpe, reprit le projet XJ27. Bien qu’il ne soit pas en accord avec le style de la voiture, notamment en ce qui concerne les flying butresses, il s’attela à rendre commercialisable les idées de Sayer sans trop les modifier. Afin de rendre la voiture compatible avec les normes de sécurité en vigueur aux USA, il fut décider d’y ajouter des pare-chocs plastiques proéminents et un spoiler avant. La calandre fut redessinée moins imposante et les double optiques prévus d’origine furent remplacés par des phares ovales. Le coffre de malle arrière fut aussi modifié afin que l’on puisse y ajouter des lampes pour éclairer la plaque d’immatriculation ainsi qu’une serrure de coffre. Les feux arrières se virent agrandis.


En 1972, le style fut finalement approuvé. Cependant, les retards que connaissait l’usine d’emboutissage de la BLMC, Pressed Steel, différèrent la mise en production de deux ans. Puis, en 1974, la nationalisation de la British Leyland Motor Company, devenue British Leyland Ltd, retarda encore le lancement de la nouvelle Jaguar. C’est donc en 1975 que la XJ-S, annoncée comme la nouvelle type E bien que ce ne fut jamais l’intention de ses concepteurs, est lâchée dans un monde hostile en pleine crise pétrolière.



Il n’en fallut pas plus pour qu’elle reçoive un accueil des plus glacials. Les passionnés de la marque ne virent pas en elle la descendante de l’icône des sixties et son style novateur ne fit pas du tout l’unanimité. Bien qu’en avance sur son temps avec son puissant V12 à injection directe, le public connaissait l’état de crise dans lequel se trouvait Jaguar et imputa à la nouvelle direction, British Leyland, ce qu’il percevait comme un échec. On considéra que trop de gens avaient participé à ce projet et que l’esprit de William Lyons avait été trop largement dilué.
Les premiers essais dans les magazines vantèrent les qualités routières de la XJ-S, la souplesse de son moteur ainsi que son incroyable capacité à propulser ses 1800 kg jusqu’à des vitesses inavouables. Mais tous s’accordèrent à écrire que la voiture avait une esthétique disgracieuse. Vendue trois fois plus chère que la type E en son temps, la mal aimée peinait à trouver sa clientèle. Elle tint bon malgré sa mauvaise image et une crise pétrolière, point noir pour un moteur tel que son V12 à l’appétit gargantuesque.
Afin d’attirer un peu plus les potentiels acheteurs, la firme Jaguar, sous la tutelle de son nouveau directeur, John Egan, fit appel au brillant ingénieur suisse, Mikael May. Ce dernier mit en pratique son principe de culasse à chambre de combustion Fireball, donnant naissance à la variante HE (High Efficiency) du moteur V12, commercialisée dès 1981. Cette nouvelle version, moins gourmande en carburant , s’accompagna de quelques modifications (certains diront « améliorations ») esthétiques. La Jaguar reçut, entre autres, de nouveaux pare-chocs plus fins, rehaussés de chromes, ainsi qu’un liseré courant tout le long de la carrosserie, amincissant ses lignes.



Dès lors, les ventes de cette nouvelle version ne cessèrent de croître. Une nouvelle motorisation, le 3,6 litres 6 cylindres, vint s’ajouter au catalogue en 1983. Côté carrosserie, les versions targa et cabriolet vinrent enrichir l’offre durant les années 80. La production passa de 1290 véhicules construits en 1981 à presque 11 000 en 1989. Cette même année, la XJ-S connut un profond restylage esthétique et mécanique, perdant au passage son trait d’union pour devenir XJS. En 1984, Jaguar fut privatisé avec toujours John Egan à sa tête. Dès lors, la marque connut un renouveau et la qualité de fabrication des modèles redevint, progressivement, ce qu’elle devait être. En 1989, le rachat de la marque par Ford accéléra cette croissance. En 1996, année de fin de production de la XJ-S/XJS, 115 415 voitures auront été fabriquées, toutes versions confondues.





C’est donc à bord de notre XJ-S V12 HE de 1987 que nous prenons la route un vendredi soir pluvieux de mai, pour un long périple vers la Champagne.
La décision est prise, une fois n’est pas coutume chez Retromotiv, d’emprunter l’autoroute pour rejoindre Reims et notre chambre d’hôtes. Après tout, la XJ-S est censée être une excellente routière mais l’est-elle tout autant sous une pluie battante ?
Les niveaux sont faits. Le sac est dans le vaste coffre, cohabitant avec la roue de secours positionnée verticalement contre le réservoir de carburant préalablement rempli de 90 litres de Super Sans Plomb 98.
Le GPS, placé bien en vue entre le conducteur et son passager, trône au dessus de l’énorme console centrale recouverte d’un beau placage en loupe d’orme, baptisée « la piste de ski » à cause de sa forme caractéristique. On y retrouve la traditionnelle commande de boite de vitesse automatique General Motor, telle la manette des gaz d’un avion long courrier. La sellerie et les habillages, d’un ton crème répondant au doux nom de Biscuit dans la nomenclature Jaguar, sont une invitation au voyage.
Un quart de tour de clé et le V12 démarre dans un grondement sourd, dévoilant toute sa puissance. L’habitacle de la XJ-S, très british, est bien insonorisé. Sélecteur de boite automatique sur D, les 1800kg de la XJ-S s’ébranlent. Nous sortons du garage en direction de la sortie du Havre, puis l’autoroute A29.
Rapidement à 130km/h, dans un silence royal seulement perturbé par quelques bruits d’air, nous filons en direction de la Champagne. Le régulateur de vitesse, actionné par une commande « on-off » depuis la console centrale et réglé au moyen d’un commodo à gauche du volant, permet une conduite plus fluide et reposante sur autoroute.
La nuit commence à tomber sur la Normandie. Deux crans sur le gros bouton qui sert de commande de phare à la base du tableau de bord et la route s’éclaire. Le tableau de bord s’illumine timidement. C’est la maladie des XJ-S de cette période : les ampoules qui éclairent les cadrans ont tendance à se noircir, diminuant fortement leur visibilité, bien qu’encore suffisante dans l’obscurité totale. Les phares, eux aussi, éclairent assez mal la chaussée. Il est possible que notre modèle ne bénéficie pas d’un réglage optimal mais dans tous les cas, la XJ-S de notre génération n’est pas connue pour la qualité de ses projecteurs Lucas. La nuit, quand les conditions dégradent particulièrement leur portée, une voiture pilote est une aubaine.
Sur la route, particulièrement à grande vitesse, une XJ-S, chaussée de pneus récents et de trains roulants en bon état, offre un comportement très sain. Dans le cas contraire, méfiance. Une majorité du poids de l’auto se trouve sur les roues avant (environ 1000kg contre presque 800 kg sur les roues arrières). Le train arrière peut chasser sans prévenir. Expérience vécue par un certain nombre d’utilisateurs, à leurs dépens.
Après 3h de route nocturne sans encombre, nous arrivons à 23h à Lavannes en banlieue de Reims. C’est à la chambre d’hôtes Les Célestines, située dans un ancien corps de ferme, que nous poserons nos bagages durant ce week-end champenois. Le lieu, plein de charme, est tenu par un couple accueillant. Une vaste grange est mise à la disposition des véhicules des visiteurs. Ainsi, ils seront à l’abri de la pluie qui ne cessera de tomber durant la nuit. Les chambres, confortables, sont soignées. Vue l’heure tardive, nous ne tardons pas à sombrer dans un profond sommeil. Au programme du lendemain, Reims, ses monuments et son musée de l’Automobile.
8h. La météo n’est pas très clémente. Les nuages lourdement massés dans le ciel ne laissent guère de place aux rayons du soleil. Après un petit déjeuner copieux, nous voilà installés dans la Jaguar. Un tour de clé, le félin se réveille dans un grognement. Laissant chauffer le moteur, nous prenons compte du programme de la matinée. Notre première visite sera le Musée de l’Automobile de Reims. Il est l’un des 5 plus importants de France de part sa collection, géré aujourd’hui par une association de collectionneurs. Des véhicules à 2 et 4 roues, datant de 1908 pour les plus anciens, y sont exposés. Nous effectuons alors un voyage dans le temps, arpentant les allées dans lesquelles se succèdent de nombreux joyaux de l’Histoire automobile.
Après 2h de visite, il est temps d’aller se restaurer. Nous garons la « Belle » en centre ville et dégustons un petit repas dans un restaurant face à la célèbre Cathédrale de Reims.
S’en suivra la visite de ce monument majestueux ainsi que celle du Palais du Tau dans lequel dorment les trésors de la Cathédrale, sans compter l’exposition sur la Première Guerre Mondiale et l’émotion qu’elle suscite.
A 16h, nous avons rendez-vous à la Maison G.H Martel, en plein cœur de la ville, pour une visite des caves ainsi qu’une dégustation. C’est le moment ou jamais : le roadtrip n’aura lieu que demain. Nous clôturons notre journée Reimoise par un petit restaurant situé rue du Tambour, accueillis de manière conviviale par le patron, Jérôme, avec lequel nous échangerons sur notre passion de l’automobile.
De retour à la Chambre d’hôtes, nous jetons un œil sur l’Atlas afin de nous remettre en tête le trajet du lendemain et les lieux à ne pas rater.
Après une bonne nuit de sommeil et un bon déjeuner, nous voilà de nouveau sur les routes champenoises, carte sur les genoux, appareil photo à la main pour ne rien négliger du décor qui s’offre à nous.
Notre première étape nous emmène sur un lieu historique : le circuit de Reims-Gueux. Nous stationnons le « félin » devant le stand Jaguar afin d’en tirer quelques clichés. La belle anglaise n’est pas peu fière !
Ce circuit, autrefois théâtre de nombreuses courses, telles que le Grand Prix de France en 1938 ou des courses de Formule 1 dont la première officielle en 1950, est aujourd’hui classé au Patrimoine Monumental Français. De nombreux pilotes célèbres, Stirling Moss, Mike Hawthorn et bien d’autres, se sont disputé des victoires sur l’asphalte de ses routes.
Pour l’anecdote : Luigi Musso y trouvera la mort le 6 juillet 1958.
Acculé par ses créanciers, mis de côté par ses coéquipiers Ferrari, Mike Hawthorn et Peter Collins qui ne portaient pas cet Italien dans leurs cœurs de britanniques, Musso devait remporter le Grand Prix coûte que coûte. Il savait qu’Hawthorn et Collins ne partageraient pas les gains avec lui. Lancé à pleine vitesse, oubliant tout danger, il perdra le contrôle de sa Ferrari 246 Dino dans la grande courbe du Calvaire après les stands, sortant de la piste à 250 km/h, puis partira en tonneaux dans un champ. Il décédera quelques heures plus tard.


Le circuit subira de nombreuses modifications au cours de ses années d’activité. C’est en 1966 qu’aura lieu la dernière course de Formule1 et en 1972, le Championnat de France de moto clôturera son existence. Il fermera suite à des problèmes financiers devenus insurmontables, avec à son palmarès 14 Grand Prix de France de Formule 1. Chapeau bas !
Chez Retromotiv nous aimons ces lieux chargés d’histoire et si nous fermons les yeux nous pouvons entendre les moteurs vrombissants, la foule scandant le nom des Pilotes, les crachotements du micro… Chaque recoin est hanté par ce qui fut un lieu de compétition et d’Histoire automobile. Nous y passons un petit moment, scrutant chaque parcelle, comme pour nous imprégner d’une nostalgie impalpable que nous avons connue à travers les articles retraçant cette Histoire.
Trêve d’émotions ! La route nous attend !
Nous roulons à travers les villages et les vignes qui parsèment ce décor bucolique. Le soleil commence à pointer son nez et ce n’est pas pour nous déplaire. Vrigny, Pargny les Reims puis Chambrecy par la D980. Des vignes et des vignes sur des kilomètres…
Notre Jaguar nous transporte à travers les routes vallonnées sans sourciller. Quel confort ! D’ailleurs elle a été conçue dans ce but, faire d’un voyage une croisière. La position conducteur est aussi agréable que celle du passager : Un salon sur roues !
Nous passons devant l’Eglise Saint-Laurent de Ville en Tardenois datant du XIIème siècle pour ses plus vieux vestiges.
Nous avons fait le plein le matin même. Le compteur indique un consommation moyenne de 15 litres au cent. Nous ne vous cacherons pas que la demoiselle « so british » est quelque peu gourmande, d’autant plus lorsqu’elle se retrouve à circuler en ville.
Nous traversons Romigny puis le joli petit village d’Athenay. Nous empruntons la D23 qui nous mènera vers un changement de décor lors de notre arrivée dans le parc naturel régional. Les vignes à perte de vue laissent place aux forêts majestueuses.
Nous faisons une halte au Prieuré de Binson pour prendre quelques clichés de notre auto, devant le Collège catholique. Le lieu est superbe et met en valeur notre monture sous tous ses angles.
Après avoir croisé quelques animaux insolites, nous faisons route en direction de Tincourt, Venteuil par la D22 puis Arty et enfin Fleury la Rivière, suivant la route de Champagne. Les vignobles et les maisons Champagne se succèdent affichant leurs marques avec fierté.
S’en suit Hautvillers et son Abbaye bénédictine, située sur la côte sud de la Montagne de Reims, surplombant les boucles de la Marne.
Nous arrivons enfin à Epernay, située au pied d’un plateau crayeux, d’où le nom de la région « Champagne crayeuse ». C’est la craie qui, grâce à la réverbération qu’elle donne au sol, permet la culture de vignes sur les coteaux constituant le vignoble champenois.
Cette ville est le siège de plusieurs grandes maisons de champagne, dont Moët & Chandon et son orangerie ou encore la maison Mercier et son tonneau « le plus grand du monde » ainsi que d’autres grands noms du milieu. Ces maisons possèdent des immeubles du XIXème siècle de style Renaissance ou classique qui sont, pour la plupart, situés sur l’Avenue de Champagne que nous traversons à bord de notre auto.
La plus grande partie des caves de ces maisons de champagne se trouvent sur cette avenue. Outre le stockage du vin, elles servent d’abri pendant les différentes guerres et abritent même une course de voitures en 1950, organisée par les usines Renault lors de la présentation de la 4CV.
Nous quittons Epernay en direction de Vertus, à 20 km, chef lieu des Grands Crus, au sud de la Côte des blancs. Malheureusement, le temps nous manque et nous ne ferons pas de détour par cette commune que tous les guides touristiques encensent. A nouveau des vignes et des maisons prestigieuses de Champagne se succèdent, le paysage bucolique défilant à travers les vitres latérales.
Nous traversons Champigneul au centre duquel se dresse l’église Saint-Rémy, construite durant la première moitié du XIIème siècle. Un ravissement pour les yeux.

Chemin faisant, nous faisons une halte vers Louvois, afin de se dégourdir les jambes sur les sentiers des Faux de Verzy. Une petite explication s’impose. Un « fau de verzy » est un hêtre dit tortillard.
Le mot «fau» désignait le hêtre en ancien français. Ils sont différents des hêtres communs par leur architecture. Les rameaux forment des coudes et se soudent entre eux, donnant alors à l’arbre une forme peu commune.
S’en suivent, à nouveau, les routes jalonnées de plaines et de vignobles. Le soleil a l’air décidé à nous tenir compagnie cet après-midi là. Soudain, au milieu d’un océan de vignes, nous apercevons le phare de Verzenay. Construit sur une butte par Joseph Goulet au début du XXème siècle, ce monument était un bon moyen pour faire la promotion de son champagne. Il sera le théâtre de nombreuses fêtes et dégustations avant d’être utilisé comme tour d’observation par l’armée française durant la Première Guerre Mondiale. A présent, il joue le rôle culturel de musée de la vigne.
Un peu plus loin, les curieux peuvent faire une halte au moulin de Verzenay, classé monument historique et appartenant à la maison G.H Mumm.
Notre route se poursuit sur la D26. Nous traversons Mailly, Ludes, Villers Allerand puis Ecueil et concluons notre road trip dans le petit village de Sacy.
La Jaguar a soif. Nous faisons le plein et reprenons l’autoroute direction Le Havre sous un soleil radieux, ce qui nous permet d’apprécier la route du retour malgré la fatigue qui nous gagne peu à peu.
A nouveau de beaux souvenirs dans cette belle région à bord de notre anglaise.
Retrouvez certaines photos de cet article en haute résolution : Jaguar XJ-S V12
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